CUBA SI 64 !
1964 : un été cubain
Le corpus d’images baptisé CUBA SI 64 ! produit par Una Liutkus à Cuba en 1964 s’inscrit dans une tradition photographique assez commune : la photographie amateur de voyage. Ce sont en tout et pour tout 365 photographies noir et blanc et diapositives couleurs rescapées d’une époque, qui nous parviennent là d’une façon inopinée résonnant avec un contexte médiatique particulier.
La découvreuse de l’oeuvre, Marie Lelièvre et Una Liutkus en conservent le secret, mais il est en effet assez surprenant qu’en plein ressac de l’affaire Cohen/Kouchner, révélé par le livre de Camille Kouchner « La familia grande », les images de la jeunesse de Marie-France et Evelyne Pisier, amies d’Una Liutkus, deux des protagonistes principales du récit soient aussi celles que l’on retrouve parmi les plus nombreuses dans les photographies d’Una. Elles sont les figures de 1er plan de son court récit photographique. Avec pour issues récentes, des publications dans Paris Match, Marie-Claire… un passage télé à BFM… Ce petit corps d’images aurait pu tout aussi bien passer inaperçu et soudainement, il trouve une vocation journalistique inattendue.
Et puis bien sûr il y a Cuba, La Havane, Santiago de Cuba, le peuple cubain, sa beauté, sa joie et sa dignité et une histoire, d’autres personnages, historiques et glorieux : Fidel et Raul Castro et Ernesto « Che » Guevara.
Au long des rues, Una saisi parfois des instants parfois magiques, comme celui de cet enfant cheminant tel un funambule sur le muret du Malecon, des instants fulgurants comme celle de cette jeune femmme brune renversant brusquement sa tête en arrière, ou celle du couple en plein débat, faite à la volée. Una est habile.
Quelques autres de ses photographies accèdent à un statut emblématique, telles celles de la discussion à bâtons rompus entre Fidel et des jeunes où l’on retrouve Evelyne à ses côtés, excellente séquence à laquelle il ne manque que le son !
Mais parmi les images d’Una Liutkus, j’aimerai commenter ce petit reportage sur un « dimanche à la campagne » à bord d’un yacht à la pêche aux langoustes où se lôvent pour moi les moments les plus savoureux de l’ensemble, nimbés d’intime et de romantique. L’ambiance est décontractée, Fidel grassouillet en maillot de bain couteau au mollet cause avec les uns et les autres, les convives sont nombreux, le ciel bleu et le soleil brille. Evelyne est en bikini, blonde à croquer. On goûte avec une légère culpabilité de voyeuriste impénitent cette amourette entre Fidel et Evelyne. Et comme le dit si joliment Marie Lelièvre à propos de l’une des photographies du couple : « Un moment partagé en silence, rien que pour eux peut-être. Leur jeunesse est insolente, ils “habitent” l’image, dos nus, peau contre peau. »
Ultime anecdote au sujet de cette série, à certains moments à bord du yacht, l’appareil photo change de mains et l’on voit ainsi apparaitre Una pensif en pleine discussion avec Fidel, une camera de cinéma 16mm à la main. Étonné par l’absence de documents filmés dans son fond d’archives, je lui demandais ce qu’il avait fait de la bobine qu’il avait tourné ce jour-là. A cela… je vous laisse lui poser la question par vous même car c’est cela aussi Una, une mine d’anecdotes facétieuses et inattendues à découvrir en « live » !
Patrice LOUBON
